Tout le monde a un ou deux prénoms, parfois même trois, pour ma part, j’en ai le. Louhla est le premier, et il vient de ma mère, parce qu’elle tenait vraiment à mettre son grain de sel dans mon appellation. Et vous savez quoi ? Le deuxième, Raphaëlle, me vient aussi de ma mère. En fait, tout ce que je possède aujourd’hui vient d’elle. Pourquoi ? Parce que j’ai grandi sans père, et qu’il a jamais fait aucune décision dans ma vie, c’est aussi simple que ça. En ce qui concerne mon âge actuel, je dirais 22 ans… Vingt deux ans depuis le 26 février. J’aime pas beaucoup parler de mon âge, j’ai toujours l’impression que je suis de plus en plus vieille en gardant mon âme éternelle d’enfant parfois… Évidemment, tout le monde nait à un certain endroit. Moi, c’était chez moi… enfin, mon ancien chez moi. L’appartement dans lequel ma mère vivait à l’époque où j’étais encore enfant. On a déménagé une bonne dizaine de fois ensuite, je sais pas pourquoi, ma mère a toujours refusé de m’le dire. Je m’en fous, plus qu’autre chose, parce que ma mère est une toxicomane presque schizophrène et complètement parano qui pense que le gouvernement la traque pour la tuer ou un truc dans le genre. Je sais même pas comment j’ai fait pour vivre avec elle aussi longtemps avant de partir de chez moi et de commencer à vivre une vraie vie. Vraie vie de merde… Ma pauvre mère est Russe, en plus de tout ça. Vous savez ces Russes qu’on envoie en Amérique pour faire chier et parce qu’elles ont apparemment perdu l’héritage familial ? Ma mère en fait partie… Et vu que j’ai plus de père, j’ai hérité de son nom, Grigoriev… J’crois vraiment que ce soit la seule bonne chose qu’elle m’ait jamais donné, parce que ma vie telle qu’elle est aujourd’hui, c’est certainement pas elle qui m’a aidé à y parvenir. Ouaip, vrai, je suis à l’université aujourd’hui, et j’étudie dans une matière qu’on appelle communément « cinéma. » J’aime le cinéma, et c’est un rêve absurde, mais tout le monde a le droit de rêver.
« Qu’est-ce que tu me veux, Brewster ? » Je me retourne, et il est là, à quelques centimètres de moi. Il s’approche violemment, me prenant par la taille et m’embrassant dans le cou jusqu’à me faire regretter d’avoir posé les pieds dans ce foutu appartement. Brewster, c’est Jonah. Il me rend complètement dingue, mais évidemment je lui dirai pas. Il est con, et il se tape le monde entier quand il sort, et il revient me voir ensuite en me chantant des merdes comme « Je t’aime » et « T’es la seule pour moi. » J’lui ai souvent répondu que s’il m’aimait, il sacrifierait les autres filles pour moi, mais c’est pas encore arrivé, alors pour l’instant on traîne. On fait l’amour quand bon nous semble, et on se promène en tant que « couple » quand bon nous semble aussi. Quand on est de bonne humeur, parce qu’on a chacun notre sale caractère, et que quand on se dispute c’est pas beau à voir. Enfin, pas pour les autres… moi ça me fait rien, ou peut-être que si. J’veux tout simplement pas le montrer, parce que j’suis pas le genre à montrer ce que je ressens. C’est pas mon fort, et j’aime pas que les gens me prennent en pitié, alors je ravale mon égo et j’affiche ce que j’ai envie que les autres voient. « Tu m’énerves, tu le sais ça ? » Il sourit dans mon cou, place une main sur ma jambe et l’autre derrière mon dos pour me coller à lui. Je peux clairement sentir son torse extrêmement musclé et c’est ça, exactement, qui me rend encore plus folle de lui. Putain ça doit faire des années que j’me trimballe ce sentiment qu’il anime en moi, parce que ça fait des années qu’on se connaît, et que ça fait des années qu’on pratique le sport de chambre ensemble. Je sais même pas pourquoi on a pas arrêté… Je sais qu’on a commencé à une fête par contre – quel cliché merdique, mais c’est la vie – et puis qu’ensuite on s’est trop évité… On s’est évité parce qu’avant de coucher ensemble à la fête, on était amis. On était amis et c’était le copain de ma mei… mon ex meilleure amie. Il était amoureux d’elle, aux premiers regards. Quand on le connaissait, on savait tous qu’il était différent. Qu’il tombait pas vraiment amoureux des filles à cause de son passé. Son passé auquel j’ai grandement goûté, et qui m’a fait remercier le ciel de m’en être sortie. Si j’avais continué dans cette voie, je sais même pas si j’serais ici aujourd’hui. J’ai tellement fait de conneries, parce qu’il m’entraînait, et que j’me laissais faire, parce que j’étais jeune, naïve et amoureuse. Aveuglée par le fait que ce que j’faisais était illégal. Je l’ai aimé, ce putain de Brewster, je l’aime, ce Brewster. Pas question que j’cède, pas comme avant. Fool me once, shame on you. La deuxième fois, impossible. « Toi… J’te veux toi, Raph. » Qu’il aille se faire foutre.
Je suis coincée, j’peux vraiment rien faire dans cette position. Il me coince, et le moindre mouvement fait est bloqué par ses mains, son torse, sa grandeur. Son sourire m’éclate, il me dirige sans me diriger, je le hais. « T’es un enfoiré égoïste… Pourquoi tu me voudrais moi en particulier ? » Il arrête ses baisers dans mon cou, et prend mon visage avec ses deux mains avant se passer ses lèvres doucement sur les miennes, histoire de me faire lamenter et de me rendre encore plus cinglée. « Je sais, mais c’est comme ça que tu m’aimes, pas vrai ? » Alors là, il peut toujours courir. C’pas parce qu’il me caresse et qu’il me pelote que j’cèderais… « Qu’est-ce qui te fait croire ça ? » Il rit, et s’arrête. Plonge ses yeux dans les miens et m’embrasse tendrement. « Ça. » J’essaie de le repousser, sans succès. Il m’assoit sur le bord de la fenêtre de sa chambre de résidence. Cette foutue fenêtre creuse où on a tellement fait. Trop de souvenirs, rien que dans cette position, dans cette chambre, partout on est allé ensemble. Je reprends le dessus de mes pensées, et je le prends par les sentiments pour qu’il me laisse aller. « J’ai un rendez-vous avec tu sais… Matthew. » Il déteste Matthew. Après toutes ces années qui sont passées, il le déteste encore. Matthew c’est mon ex petit-copain, et je suis en quelques sortes « pote » avec. Il me sert dans les occasions oppressantes – comme celle-ci – et chaque fois que je prononce son nom, Jonah devient fou. Il se détache brusquement de moi. Il sait parfaitement que je joue avec lui, mais il a la même foutue réaction chaque fois. Je souris, fière de mon sale coup. « Toujours jaloux ? » Je le regard, d’un regard malicieux. Il est furax, ça me rend presque pétillante. Il croise les bras sur son torse nu, putain quel corps de Dieu. Je me retourne et ramasse les affaires que j’étais venue chercher. Les vieux CDs et le petit tas de vêtements que j’avais oublié. J’veux lui dire que j’veux plus de cette relation non-exclusive. J’veux du vrai, du sérieux. En fait, j’veux qu’il arrête de jouer au con et qu’il grandisse. Moi je l’ai fait, ça devrait pas être trop dur pour lui… Mais c’est un mec, et il faut jamais s’attendre à trop. Jonah est un vrai cas, en plus de ça. Quoi qu’il en soit, rendue devant la porte, je me retourne et lui fait un clin d’œil. « On se revoit plus tard. Je sais que tu seras entrain de m’attendre pour voir si Matthew a pas retenu toute mon attention. ‘Journée, Brewster. »
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Dernière édition par L. Raphaëlle Grigoriev le Lun 15 Mar - 22:51, édité 4 fois
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